Agenda

Année 2019

 

Mercredi 27 novembre 2019 - 19h

Café littéraire : L'art de la guerre - Sun Tzu

 

Mercredi 18 décembre 2019 - 19h

Café littéraire : La densification de l'être - Chapus et Venard

 

 

Tarif  : 5€ 

 

En partenariat avec l'Espace Mouneyra

118, rue Mouneyra - 33000 Bordeaux
www.espace-mouneyra.com

Citation

" L'histoire est la philosophie enseignée par l'exemple. "

 

Denys d'Harlicarnasse

Nous Contacter

Bordeaux Philo

49 avenue Jeanne d'Arc

33000 Bordeaux

Tel : 06 31 17 45 84 

 

 

Le dialogue intérieur à l'origine de notre liberté

 

Rien n’est plus difficile à déboulonner qu’un homme fermement ancré dans ses opinions. Nos habitudes de penser sont telles que nous préférons bien souvent les beaux mensonges qui peuvent s’inscrire dans notre confortable vision du monde, plutôt que la froide vérité qui s’introduit chez nous comme le vent d’hiver à travers une fenêtre mal ajustée… Bousculer les hommes dans leurs opinions figées, Socrate en a fait son métier. Sur l’agora d’Athènes, allant et venant parmi ses concitoyens, il développa cet art du questionnement et du dialogue par lequel un homme, faisant face à ses propres contradictions, abandonne un peu de lui-même pour acquérir une plus grande liberté. La bienveillante cruauté du philosophe contraste avec la mielleuse fourberie du sophiste qui tourne l’opinion de l’autre à son avantage plutôt que de l’élever vers la vérité. Socrate est comme un taon qui aiguillonne sans cesse la pensée paresseuse de son interlocuteur ; il est un remède à l’inertie de notre mule intérieure qui préfère rester bloquée dans le pré carré de ses peurs et de ses frustrations plutôt que de faire face à ses incohérences et à ses abandons.

 

Comprenons bien de quoi il s’agit avec cet art du dialogue. Il s’agit de notre liberté. Notre liberté intérieure et extérieure. Un homme qui demeure dans la confusion de ses idées et de ses passions est l’esclave de lui-même, et ne peut que devenir au fil des années l’esclave d’un manipulateur qui saura jouer de ses doutes et de ses angoisses. S’est-on jamais demandé pourquoi tant de révolutions politiques et sociales à travers les siècles n’avaient jamais abouti qu’au remplacement d’une tyrannie par une autre ?… Bien fou celui qui penserait qu’il suffit de supprimer un tyran pour mettre fin à la tyrannie… Jusqu’à aujourd’hui, on peut penser, en effet, que les peuples se sont usés à combattre les tyrans, mais ne se sont pratiquement jamais attaqués à la véritable cause de la servitude. La cause de cette servitude se trouve en nous-mêmes : nous sommes les jouets de nos désirs, les jouets de nos instincts, les jouets de nos émotions, – ces choses que nous n’avons pas décidées, mais qui vivent en nous, tiraillant par leurs caprices contradictoires la pauvre marionnette que nous sommes… Lorsque Socrate nous invite à sortir de la caverne de nos illusions, c’est pour prendre conscience de la confusion qui règne en nous-mêmes et qui nous empêche d’accomplir nos aspirations supérieures. Que sont-elles, ces aspirations supérieures ? – Simplement d’autres ficelles, mais dont la tension ferme et continue veut nous faire tracer les lignes d’un destin.

 

Grâce à la technique du dialogue socratique, nous prenons conscience des postures psychologiques qui se cachent derrière nos questions et nous remontons jusqu’à l’essence de notre questionnement, là où réside notre « vrai moi », cette partie de notre être absolument déterminée à accomplir de grandes choses, amoureuse du destin. Ce que nous avons à gagner, par cet exercice, c’est la stabilité émotionnelle, l’assurance mentale, la clarté de la pensée qui permet de faire des choix et de s’y tenir. Sans elles, aucune liberté n’est possible, ni en nous-mêmes ni dans la société. La liberté commence avec la libération ; elle se réalise à grands coups de marteaux. Les questions répétées que nous pose Socrate fragilisent peu à peu nos chaînes. Des pourquoi creusent sans cesse d’autres pourquoi et font finalement apparaître les bases solides sur lesquelles peut reposer un raisonnement sans faille, harmonieux, inexorable. L’exercice est loin d’être une partie de plaisir, car les coups de marteaux qui tombent sur nos chaînes pourraient nous briser les os… si l’orgueil se rétracte dans sa carapace, la partie est perdue. Un dialogue socratique réussi commence donc par le fait d’assumer notre imperfection et notre vulnérabilité. C’est le pas essentiel qu’il faut faire pour sortir de nos propres mensonges. Cette posture est, paradoxalement, la source de la véritable force et du véritable courage. Celui qui met de côté son orgueil et son ego se donne tout simplement une chance d’évoluer. Au début, il croit tomber, alors qu’il ne fait qu’ouvrir les yeux sur la réalité ; puis, petit à petit, clarifiant ses idées et surmontant ses contradictions, il acquière une confiance inébranlable en lui-même. Cette confiance, à l’inverse de l’orgueil, est une juste connaissance de soi qui ouvre l’âme humaine sur la connaissance de l’autre.

 

Seul un homme qui accepte de se remettre en question peut apporter des réponses à une collectivité qui cherche son unité dans la diversité. Voici la puissance du dialogue : elle relie les hommes et leur permet de se comprendre. Elle est la base de la tolérance et de la fraternité. L’authenticité des relations humaines naît ainsi du combat que chacun livre en lui-même. Le dialogue socratique est une guerre – une guerre que la conscience déclare aux automatismes de l’instinct. Il existe en nous un fond d’animalité qui déclenche la fuite du faible et assure le mépris du fort. En sortant de la confusion des désirs et des passions, nous réalisons ce fantastique tour de force qui consiste à réaliser la paix par la guerre. La paix extérieure par la guerre intérieure. Au bout du chemin, l’idéal du citoyen se confond avec celui du sage : l’harmonie de l’univers s’établit au milieu de la cacophonie du monde.

Bordeaux Philo

 


  Aucun commentaire pour le moment concernant le sujet « »!

Bordeaux Philo - 118 Rue Mouneyra - 33000 Bordeaux :: Tel : 05 56 08 99 96